DOSSIER

Dr. Baleguel NKOT: « Il ne faut jamais prendre les armes pour les revendications »

Dans un discours vrai et républicain, le secrétaire général de l’Union des Populations du Cameroun a tenu un langage ferme samedi dernier à ses camarades du parti à Bafoussam. C’était à la faveur de la cérémonie d’installation de la coordination ouest du parti historique. Nous publions ainsi en intégralité cette sortie musclée qui fait échos.

Je m’en vais évoquer trois choses. Ces choses sous-tendent l’installation de la coordination régionale. Ça fait longtemps que les gens ne veulent plus entendre le discours nationaliste. Je reviens au pays Bamiléké pour parler du discours nationaliste. Parce que les pays Bamiléké et Bassa sont les pays qui ont été indexés comme des pays nationalistes. Retournez dans votre histoire. Pour parler du nationalisme, il faut trois points. Nous sommes les fils et filles d’un même pays. Nous devons vivre ensemble, et nous devons vivre dans l’unité. Le premier pan du nationalisme c’est l’unité nationale. Nous avons un seul pays. C’est le Cameroun. Nous ne voulons pas perdre un seul millimètre. C’est d’où le nationaliste va vous parler de l’intégrité du territoire. Ça veut dire que le territoire doit rester dans ses frontières. Et nous avons sollicité l’indépendance. Nous avons dit que nous sommes déjà matures, nous savons gérer nos choses nous-mêmes, c’est pour cela que je vais vous parler de la souveraineté nationale. Ce sont ces trois choses qui gênent actuellement notre pays, et je refuse d’admettre que notre pays va en bas. Je refuse d’admettre que nous ne pouvons pas trouver de solution dans notre pays. Je refuse aussi d’admettre que seul au Cameroun, il y a des choses qui ne marchent pas. Je crois, que nous sommes capables de vivre dans la paix et la concorde. Je crois que dans ce Cameroun, chaque camerounais peut manger trois fois par jour. Je crois qu’on peut appliquer la justice au Cameroun. Parce qu’un pays qui ne respecte pas ses lois est un pays dans la dérive. Parlons de l’unité nationale, ceux qui croient que dans un mosaïque de peuple qu’il y a au Cameroun, un seul peuple peut prendre le pouvoir pour lui-même, ils se trompent. Ceux qui croient, que dans ce mosaïque de peuple, il y a des mots qu’on peut fabriquer comme repli identitaire et veulent nous reculer 70 ans en arrière avant l’union des populations du Cameroun qui a été acceptée ici à l’ouest, ils se trompent. C’est pour cela, que pour rien au monde, on ne pourra accepter qu’un seul pays devienne deux pays.

« La guerre de sécession n’a jamais abouti à quelque chose de satisfaisant »

L’unité n’est possible que si les gens se sentent à l’aise. La meilleure façon c’est que chacun soit avec ses valeurs. Parce que l’unité n’est bien que dans la diversité. Que chacun a ses coutumes, ses mœurs. C’est pour cela que je refuse de croire, que dans ce pays, ceux qui cultivent l’intérêt individuel seront au dessus de ceux qui cultivent l’intérêt national. L’intégrité territoriale, ce pays avait plus 750 000 Km2, une partie est allée en RCA, l’autre au Nigeria et en Guinée Équatoriale, nous sommes restés seulement avec 475 000 Km2. Mais si davantage, on coupe encore en deux, j’entends parler de l’Ambazonie, c’est des termes qu’il faut bannir. Si on coupe en deux, qui vous dit que les deux portions là les gens ne vont pas demander qu’on coupe encore. Après les gens vont encore dire que non on ne s’entend pas au Nord-ouest et au Sud-ouest, coupons encore en deux, parce qu’il y aura des replis identitaires dont on parle (…)

Quand on parle de décentralisation, ça veut bien dire que chaque mairie peut se développer avec ses populations locales. Si par exemple le Cameroun a 5000 milliards, pourquoi on ne peut pas donner même 2 milliards à chaque mairie pour se débrouiller ? Une commune qui a 2 milliards par an, pendant 5 ans elle va se développer. Mais si vous allez plutôt au niveau où vous allez partager le pays qui vous a dit que le gouvernement fédéré là ne va pas concentrer le pouvoir ? C’est pour ça que je parle de la décentralisation, parce que c’est la meilleure façon d’atteindre les individus dans leurs localités. Dans aucun pays au monde, la guerre de sécession n’a jamais abouti à quelque chose de satisfaisant. C’est pour cela, étant ici à l’ouest, vous qui êtes à côté du Nord-ouest, je donne un message à la coordination, n’ayez pas peur, nous iront ensemble dire à nos frères, que tout mouvement de sécession est un mouvement qui nous ramène 70 ans en arrière. En vous installant c’est pour gagner les mairies oui, mais pour résoudre les problèmes qui minent le Cameroun. Restez vous-mêmes. Ce n’est pas en flattant les gens qu’on devient un grand parti politique. Chaque fois qu’une motion est prise et qui va dans le sens de notre fondement et notre idéologie, supportez là. Nous devons tout faire actuellement pour que la guerre cesse dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest. Parce que ça souille le Cameroun. Il y a des jeunes filles qui se baladent à Yaoundé sans emplois, et vous savez ce qui peut les arriver. Faites tout à partir d’ici, parce que vous avez des familles là-bas.

«Le Cameroun n’est pas Cameroun sans le Nord-ouest et le Sud-ouest »

Je peux parler toute la journée parce que l’intégrité nationale c’est ça qui fait de nous un pays. Le Cameroun n’est pas Cameroun sans le Nord-ouest et le Sud-ouest. La souveraineté nationale, la guerre d’indépendance, ont particulièrement fait des morts en milliers dans les pays Bamiléké et Bassa. Vous êtes mes fils, mes frères et sœurs, je voudrais vous dire, il faut défendre ce mot souveraineté. Ça veut dire que je suis indépendant, je peux régler mes problèmes moi-même. Il n’y a pas de crainte à dire, que nos frères qui sont dans la diaspora, ils sont là pour nous apporter des solutions, ils sont là pour développer le Cameroun en rapatriant de l’argent ici. Mais cette image, de brutalité et de violence, à l’extérieur du Cameroun, projette sur nous une image des personnes violentes. Il y a tout à faire au Cameroun. Je vois mal les blancs venir résoudre un problème au Cameroun. Ces images qu’on projette partout, que les camerounais ont lutté dans les hôtels en Suisse, ça ne devrait pas se passer. Et c’est le plus vieux parti qui vous dit ça. Parce que nous avons lutté, les gens sont morts pour l’indépendance, nous avons dit: c’est fini avec la colonisation des blancs. Pourquoi nous devons nous étaler chez-eux ? Je ne dis pas ça pour flatter une certaine opinion, je le dis parce c’est le fondement de l’union des populations du Cameroun. Une fois que vous avez demandé l’indépendance, vos problèmes doivent être résolus à l’intérieur de votre pays. J’ai entendu les gens fabriquer les mots comme sardinard, antisardinard, tontinard, alors que nous sommes le même Cameroun (…)

«Il ne faut jamais aller étaler à l’extérieur du pays une image négative »

A force de s’occuper des futilités, le pays a les problèmes. À force d’encourager les injustices, le pays des problèmes. À force d’accepter des inégalités, le pays a des problèmes. À force d’oublier la morale, le pays a des problèmes (…). Voilà un pays, alors que les gens ont fait l’école, les gens ont fait la politique, les gens ont le cerveau pour réfléchir et il n’y a personne pour réfléchir. Nous interpellons nos frères du Nord-ouest et du Sud-ouest, de savoir que jamais on ne fait des revendications en prenant les armes. Chaque fois lorsque vous prenez les armes, alors que vous n’avez pas été formés pour porter les armes, vous commettez des exactions. Et lorsque les petits enfants manipulent les armes à feu, ils jouent avec le feu. Tout ce que vous devez faire c’est pour la promotion et le développement de tout un pays. Jamais, que quelqu’un ne vous dise un jour, qu’il faut faire la politique pour la promotion des Bamiléké. Jamais quelqu’un ne doit dire, qu’il faut faire la politique pour la promotion des Bulu, des Massa ou des Foulbés. Ce sera le chemin de l’échec. Et ce que l’union des populations du Cameroun refuse sera refusé par Dieu. Il faut le langage du courage, loin des flatteries, il faut être courageux, pour faire le diagnostic des problèmes qui minent le Cameroun et ne pas faire ce qu’il faut faire. En définitive, je dis, il ne faut jamais prendre les armes pour les revendications, il ne faut jamais aller étaler à l’extérieur du pays une image négative et il faut tout faire pour que chacun se sente à l’aise dans sa localité à travers une décentralisation vraie. Je voudrais vous dire ici à l’ouest, n’oubliez jamais que vous êtes des nationalistes. Un nationaliste est pour l’unité de son pays, l’intégrité territoriale et la souveraineté nationale (…)

(c) Dr. Baleguel NKOT, SG-UPC, Bafoussam le 29 juin 2019

Propos recueillis et traités par Sébastien ESSOMBA

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