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Rev. Ahmat Djouneid E. Noureddine Sine : “La fête du sacrifice est l’un des temps forts de l’une des meilleures décades de l’année”

L’imam principal de la mosquée centrale numéro 2 de Bafoussam et Président du Conseil des Imams et Dignitaires Musulmans du Cameroun pour la Mifi a dirigé ce jour à l’esplanade de la place des fêtes de Bafoussam, la grande prière de l’Aïd El Kebir. Dans un sermon dense et riche en enseignements, il est revenu non seulement sur la symbolique de la fête du sacrifice, mais aussi sur les grands sujets d’actualité de l’heure, en l’occurrence la croisade contre la Covid-19 et la mobilisation du mouvement extrémiste de la BAS à Genève en Suisse qu’il condamne amèrement. En intégralité le sermon de l’imam départemental.

_*MOSQUEE CENTRALE N°2 DE BAFOUSSAM: SERMON DE LA FETE DU SACRIFICE (20 juillet 2021)*_

Allah est Grand ! Allah est Très Grand ! Allah est infiniment ! Toutes les louanges appartiennent à Allah. Gloire et pureté à Lui matin et soir. Louange à Allah qui a fait des fêtes islamiques une source de joie et de satisfaction. Louange à Allah qui a fait don de ces dix jours bénis à tout serviteur reconnaissant. Gloire et Pureté à Lui qui pardonne les péchés et accepte le repentir. J’atteste qu’il n’y a de divinité digne d’adoration en dehors de Lui. J’atteste également que Mohammad est Son serviteur et Son Messager. Ô Allah ! Accorde Ta prière et Ta paix à ce noble Prophète, ainsi qu’à sa famille, ses compagnons et leurs suivants dans la bienfaisance jusqu’au Jour dernier. Allah est Grand ! Allah est Très Grand !
Frères et sœurs dans la foi ! Le déferlement des fidèles vers les différents lieux retenus pour la prière de la fête du sacrifice, leur promptitude à répondre à toutes les exigences liées au respect des gestes barrières, est symptomatique de leur désir ardent de voir enfin le bout du tunnel. C’est une aspiration légitime à un retour à la vie normale, après une longue période de restrictions imposée par le Covid 19 et dont le spectre continue à planer. Le Takbir, cette formule d’exaltation de la grandeur d’Allah, devrait encore retentir davantage ce jour pour manifester notre gratitude et implorer Allah d’anéantir définitivement ce virus et de nous aider à nous remettre de ses dégâts.

La fête du sacrifice est l’un des temps forts de l’une des meilleures décades de l’année. Les autres temps forts sont le pèlerinage qui s’accomplit depuis deux ans à huis clos à cause de la pandémie, le jour d’Arafat en est le point d’orgue dont le jeûne pour le non pèlerin expie les péchés de l’année antérieure et de l’année à venir. Il y a enfin l’immolation qui nous réapprend le sens du sacrifice enseigné par Abraham le père du monothéisme.

L’acte d’immolation a tout son sens lorsqu’il est mû par la crainte révérencielle d’Allah. Le sang de la bête sacrificielle et sa chair n’atteignent pas Allah de notre part. Il est question, au moment de poser cet acte, de se départir du temporel périssable et viser le spirituel pérenne. Cette posture élargit le champ sémantique du sacrifice et lui donne d’autres connotations tout en l’extirpant du sens étriqué où nous le confinons entre la lame du couteau et la gorge de la bête à sacrifier. Lorsqu’on s’est débarrassé de cette ornière rétrécie à travers laquelle le sacrifice est perçu et qui fait une fixation sur la bête et non la finalité de l’acte, on peut utiliser une autre grille de lecture pour relire les différents passages du Noble Coran qui narrent l’histoire d’Abraham et son fils Ismaïl sur eux la paix. Il apparaît que le sacrifice est une dimension éminente qui donne un sens à la vie de l’homme sur terre. Il est la passerelle par laquelle l’homme atteint la bonté pieuse, voire, la crainte révérencielle d’Allah. Par conséquent, il ne peut pas être un acte banal, fortuit et ex nihilo. Avant de prendre forme dans les faits, il est pensé, mûri, travaillé, vu sous tous les angles, exposé à l’appréciation de l’autre : فلما بلغ معه السعي قال يا بني إني أرى في المنام أني أذبحك فانظر ما ذا ترى (Puis quand celui-ci fut en âge de l’accompagner, Ibrahim dit : « Ô mon fils, je me vois en songe en train de t’immoler. Vois donc ce que tu en penses. » (S37V102). La mention de « l’atteinte de l’âge » renseigne sur le timing du sacrifice. Il y a un temps pour le sacrifice. Sacrifier quelque chose à temps, se sacrifier à temps donne le résultat escompté. Par contre, sacrifier à contre temps est suicidaire et ruine d’énergie. Si l’on est appelé à se sacrifier pour sa famille, pour son pays, pour sa religion, il faut le faire à temps. Honorables serviteurs d’Allah ! Partout où l’on parle de sacrifice, il y a toujours quelque chose de précieux à sacrifier sur l’autel d’une finalité plus exaltante. L’exigence de qualité sur les bêtes de sacrifice, le respect des critères d’âge et d’exemption de défauts évidents est une preuve que le sacrifice signifie aussi renonciation. Parce que la nature humaine est encline à s’attacher à ce qu’elle a acquis de haute lutte, le sacrifice doit lui apprendre le détachement. Tout ce qu’on acquiert dans ce monde aux jouissances éphémères est vain. Que l’on ne s’y agrippe point. Qu’on soit prêt à le sacrifier pour une cause noble si besoin se fait.

Pour qu’il ait un impact considérable, le sacrifice doit être l’affaire de tous. Un sacrifice unilatéral a un effet limité dans le temps et l’espace. Nous nous remémorons du sacrifice d’Abraham parce qu’en face il y avait Ismâ’il. Lorsque le fils dit à son père : يا أبت افعل ما تؤمر ستجدني إن شاء الله من الصابرين « Ô mon cher père, fais ce qui t’es recommandé : tu me trouveras incha Allah du nombre des endurants », il s’engage aussi dans le sacrifice. Le vieillard qui a enfanté sur le tard veut obéir à une injonction divine en sacrifiant la prunelle de ses yeux dans le but d’obtenir l’agrément d’Allah. Le jeune garçon veut sacrifier sa jeunesse et l’amour de ses parents dans l’optique d’accéder à l’agrément de ses parents et par ricochet celui d’Allah. Ici, la conjugaison des deux sacrifices engendre la récompense : فلما أسلما وتله للجبين. وناديناه أن يا إبراهيم. قد صدقت الرؤيا إنا كذلك نجزي المحسنين. إن هذا لهو البلاء المبين. وفديناه بذبح عظيم. « Puis, quand tous deux se furent soumis à l’ordre d’Allah et qu’il l’eut jeté sur le front, voilà que Nous l’appelâmes : Ibrahim ! Tu as confirmé la vision. C’est ainsi que Nous récompensons les bienfaisants. C’était là certes l’épreuve manifeste. Et nous le (son fils) rachetâmes par une offrande magnifique. » (S37V103-107)
Frères et sœurs dans la foi ! La somme des sacrifices déplace les montagnes et résout les quadratures du cercle. La conjugaison des sacrifices est la clé de voûte du triomphe et de la réussite en tout. Vu dans le sens de l’altruisme, du don du soi et de l’abnégation, le sacrifice peut repousser tout mal, quel qu’il soit, dans ses derniers retranchements. Notre pays est en train de traverser un épisode sanitaire d’une virulence particulière. Le nombre de personnes infectées par le Corona virus a augmenté et le taux de sévérité et de létalité de la seconde vague est inquiétant. Au moment où la variante delta est annoncée avec insistance, le sacrifice prend tout son sens dans le concours de tous pour annihiler ce virus à travers le respect scrupuleux des mesures barrières et le vaccin. A propos du vaccin, il nous est revenu que plus les gens sont vaccinés, plus le pays acquiert l’immunité collective et la capacité de transmission du virus est limitée.
Serviteurs d’Allah ! Le sacrifice requiert l’effort et le chemin de l’effort est toujours parsemé d’embûches et pavé d’insinuations et de suggestions de Satan. L’endurance est le bouclier qui protège le sacrifice. Ismâ’il sur lui la paix l’avait saisi lorsqu’il dit à son père : يا أبت افعل ما تؤمر ستجدني إن شاء الله من الصابرين : « Ô mon cher père, fais ce qui t’es recommandé : tu me trouveras incha Allah du nombre des endurants ». L’endurance est la moitié de la foi et sans foi le sacrifice est dépouillé de sa matrice. Allah nous exhorte à nous enjoindre mutuellement la vérité et l’endurance, parce que la récompense réservée aux endurants est immense. Il dit, Exalté soit-Il : إنما يوفى الصابرون أجرهم بغير حساب « Les endurants auront leur pleine récompense sans compter. » Après l’effort de sacrifice, vient le réconfort de la récompense.

Frères et sœurs dans la foi ! Notre cher et beau pays le Cameroun, ce havre de paix, est interpellé par plusieurs défis qui ne peuvent être relevés sans sacrifice. Nous avons évoqué le défi sanitaire, un combat titanesque que nous sommes en train de gagner. Il y a aussi le défi sécuritaire avec Boko Haram à l’extrême nord, la crise anglophone dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-ouest, sans oublier la région de l’est. A côté, Il y a le défi économique qui nécessite une bonne dose de résilience. Les discours de haine sur les réseaux sociaux prend de plus en plus d’ampleur et met à mal notre vivre ensemble, la violence conjugale gagne du terrain avec en prime la propension à la publication de la nudité des femmes sur la toile. Malgré tout, nous demeurons un pays fier et jaloux de son unité et sa prospérité. Le traîner dans la boue, danser sur son macchabée, se réjouir de ses malheurs, ternir son image à l’extérieur n’entame en rien son lustre et sa superbe.
Nous avons fait le choix digne de prier régulièrement pour notre pays, surtout en un jour aussi béni comme ce jour de fête où l’occasion nous est offerte par Allah de Lui soumettre toutes nos supplications relatives à la paix et la stabilité dans notre pays. Qu’Allah protège notre pays contre les démons de la division, qu’Il lui accorde la paix et la stabilité qui sont gages de développement, de prospérité et d’émergence. Qu’Il épargne notre pays de la pandémie du Corona virus et éloigne de lui d’autres fléaux qui le minent ou le guettent. Prier pour notre pays, c’est prier pour le premier des camerounais, le Chef de l’Etat son Excellence Paul Biya. Un homme de paix et de dialogue qui conduit le navire Cameroun avec beaucoup de tact de clairvoyance. Qu’Allah lui accorde la bonne santé et lui inspire la patience et l’endurance dans sa lourde mission à la tête de notre pays. Nous prions également pour nos forces de l’ordre et de sécurité qui souffrent le martyre dans les zones de conflit, nous prions pour ces personnels de santé qui sont sur le front de la lutte contre la pandémie du Corona virus, nous prions pour tous ces camerounais qui souffrent dans leurs chairs, ceux qui sont alités dans des hôpitaux, ceux qui traversent des moments difficiles, ceux qui ont perdu des êtres chers. Qu’Allah les assiste tous et abrège leurs souffrances. Qu’Allah accepte notre prière, qu’Il accepte notre sacrifice, qu’Il accepte d’autres sacrifices consentis dans d’autres domaines, qu’Il protège nos enfants en ces temps de vacances et d’oisiveté.

(c) Rev. Ahmat Djouneid Essalik Noureddine Sine, juillet 2021

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