Présidentielle 2025 : Le crépuscule d’un règne ?

À l’aube d’une élection présidentielle décisive, le Cameroun se retrouve à la croisée des chemins. Le peuple s’interroge, espère, redoute. Une question centrale domine toutes les autres : le Président Paul Biya sera-t-il une fois encore candidat à sa propre succession, à 93 ans, après 43 années de pouvoir sans partage ?
La question paraît surréaliste, presque irréelle, mais elle est pourtant sérieusement envisagée par certains cercles du pouvoir. Pourtant, il faut avoir le courage de le dire, le grand âge du chef de l’État constitue aujourd’hui un risque majeur pour la stabilité et l’avenir du pays. Ce n’est pas une insulte que de le reconnaître, c’est un constat lucide et responsable. Il ne s’agit pas ici de nier l’apport historique de Paul Biya à la consolidation de l’État camerounais, mais de reconnaître les limites physiques, mentales et politiques d’un homme manifestement usé par le temps et les lourdeurs du pouvoir.
Depuis le début de ce septennat finissant, le pays semble figé dans l’immobilisme. Les conseils des ministres ont disparu, les remaniements gouvernementaux sont devenus de vieux souvenirs relégués aux calendes grecques, malgré les scandales et l’incurie de nombreux responsables. La justice attend désespérément d’être réformée, l’administration souffre d’abandon, les institutions donnent le sentiment d’un pilotage automatique. Le Cameroun semble orphelin d’un véritable leadership.
Et pendant ce temps, la misère se généralise, le peuple s’appauvrit, les frustrations s’accumulent. Le quotidien de millions de Camerounais est fait de privations, de chômage, d’angoisses sociales, pendant que l’élite politique reste engluée dans des calculs de succession ou d’allégeance. Le temps des hommes providentiels est terminé. La nation appelle au renouvellement, à la refondation.
C’est dans ce contexte tendu que le RDPC, parti au pouvoir, est attendu au tournant. Aura-t-il le courage historique de proposer un autre profil ? Un autre souffle ? Ou restera-t-il prisonnier du mythe du “renouveau éternel”, au risque d’imploser sous le poids de ses contradictions internes ? Car il faut le dire sans détour, si Paul Biya est à nouveau investi candidat, le Cameroun court un risque d’éclatement.
La démobilisation grandissante dans le septentrion, longtemps bastion du pouvoir, en est un signe évident. Le congrès du l’UNDP de Bello Bouba Maigari, prévu le 28 juin prochain, pourrait être un moment charnière. Selon plusieurs indiscrétions, des figures historiques comme Bello Bouba et Issa Tchiroma songeraient à rompre avec le RDPC. Si cela se concrétise, ce serait un séisme politique. Une recomposition inédite pourrait s’opérer, avec l’émergence d’une candidature forte issue du Grand Nord, capable de rassembler au-delà des clivages régionaux et ethniques. Mais encore faut-il que cette recomposition soit portée par une vraie volonté de rupture avec les pratiques du passé. Le Cameroun n’a plus besoin de pantins ni de clones. Il a besoin d’un projet de société clair, d’une vision ambitieuse, d’un leadership jeune, intègre et rassembleur.
Face à l’échéance de 2025, le peuple camerounais est à bout. Il veut croire encore que l’espoir est permis. Il attend un sursaut, une transition pacifique, une alternance crédible. Ce moment de bascule ne doit pas être manqué. Il y va de la paix, de l’unité nationale, et de la dignité retrouvée du peuple. L’histoire est en marche. À chacun de choisir son camp : celui du statu quo mortifère ou celui du renouveau démocratique.
Houzerou NGOUPAYOU