DANS L'ACTUPOLITIQUEUNE

Opposition dans l’impasse : Quand le SDF et le MRC jouent au ping-pong politique

Depuis quelques semaines, le paysage politique camerounais offre un spectacle familier, presque rituel. À Bafoussam, l’on a assisté à une cérémonie d’accueil d’anciens militants et élus du SDF dans les rangs du MRC. Une semaine plus tard, c’est le SDF qui, à l’occasion des 35 ans de son existence, se vante à son tour d’avoir reçu des “nouveaux venus” en provenance du MRC. Ce jeu de transfuges, de chaises musicales partisanes, laisse perplexe.

Cela fait maintenant plus d’une décennie que ce manège se répète entre ces deux forces politiques, depuis que le MRC est venu bousculer l’ordre établi en 2012. Les pionniers du MRC eux-mêmes n’étaient-ils pas pour beaucoup des anciens du SDF ? Le paradoxe est que ces départs en fanfare se soldent souvent par des retours discrets. Et entre-temps, chaque parti s’est donné pour mission de médiatiser, presque de théâtraliser, chaque “prise” chez le voisin comme une victoire stratégique. Une victoire, vraiment ?

En réalité, ce jeu de ping-pong ressemble moins à une stratégie politique qu’à un aveu de faiblesse. Une opposition solide ne se construit pas dans les arrière-cours d’un autre parti d’opposition, mais bien dans l’élargissement de sa base militante, dans la conquête des esprits jusque dans les bastions du parti dominant. En d’autres termes, c’est la désertion des rangs du RDPC, et non ceux de l’opposition, qui devrait susciter de véritables réjouissances.

Le spectacle de ces transhumances entre formations qui se présentent comme les alternatives au pouvoir interroge la sincérité des engagements. La frontière semble floue entre conviction politique et opportunisme de carrière. Pire encore, l’insistance à se féliciter de ces recrutements entre pairs contribue à entretenir une confusion dans l’opinion publique : qui combat qui, au juste ? Quand le combat politique devient une affaire de postes, de positionnement personnel ou de calcul médiatique, la cause du changement perd de sa crédibilité.

Il y a là un symptôme plus profond de la crise de l’opposition au Cameroun. Une crise d’idées, d’éthique, de stratégie. Une crise de cohérence aussi. Car si le RDPC est l’adversaire désigné, pourquoi ces partis d’opposition ne s’unissent-ils pas plutôt pour concentrer leurs efforts sur la déconstruction du système dominant ? Pourquoi tant de bruit pour si peu de renouvellement politique ?

Il est temps de sortir de cette logique de vases communicants stériles et d’adopter une culture politique nouvelle, centrée sur les idées, les projets de société et la formation citoyenne. Tant que l’opposition camerounaise passera son temps à faire du surplace autour de querelles de personnes et de recrutements internes, elle demeurera un miroir du pouvoir qu’elle prétend combattre. En politique, l’illusion du mouvement peut être pire que l’immobilisme.

Houzerou NGOUPAYOU

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