Très remonté après le désordre imposé à la veille du jeûne du mois de Ramadan, imam Njankouo Njoya Ahmadou jounedou sine, sort de sa réserve et dénonce la politisation à outrance de l’islam. L’imam principal de la mosquée Centrale nº2 de Bafoussam et coordinateur du Cidimuc pour la Mifi estime qu’il est temps que des mesures fortes soient prises pour se débarrasser de la cacophonie.

Les fidèles musulmans du monde entier sont entrés en Carême pour le compte du mois de Ramadan ce lundi, 11 Mars 2024, sauf ceux du Cameroun. Alors que toute la communauté s’apprêtait pour le top départ de ce mois béni de l’islam, une communication de la commission nationale de croissant lunaire est venue créer du désordre au sein de la grande famille musulmane. Dans un communiqué rendu public par le Pr. Souleymane, le croissant lunaire marquant le début du mois du Ramadan n’a pas été aperçu. Et par conséquent, selon ce communiqué, le jeûne commence plutôt le mardi 12 Mars 2024. Une sortie amplement critiquée qui jette du discrédit sur l’islam, surtout lorsqu’on sait que partout ailleurs le ramadan a débuté ce jour.

LÉGITIMITÉ TRIBALE ?

Dans quasi tous les pays musulmans, le Ramadan a débuté officiellement ce lundi. Même dans les pays frontaliers du Cameroun comme le Tchad, la République Centrafricaine, le Nigeria… Mais la difficulté au Cameroun reste cette politisation ou mieux, cette tribalisation de la religion. On se souvient qu’avec l’avènement du conseil camerounais du croissant lunaire (Cccl) de Dr. Moubarak, une organisation dotée d’un matériel adéquat, la recherche de la lune ne posait plus aucun problème. Tout se passe en principe comme sous d’autres cieux, l’Arabie Saoudite en l’occurrence. Mais c’était sans compter la réalité camerounaise qui semble donner une certaine légitimité à un organe sur la base de la considération tribale. Des pontes du régime originaires du septentrion sont indexés dans ce jeu macabre. Il est question de tout mettre en œuvre pour réduire l’islam à cette partie du pays. Résultats de courses, il mène en bateau toute une communauté. On se souvient qu’en 2021, alors que les débats étaient houleux sur cette même question, le Minat avait sorti un communiqué pour légitimer le désordre de la Cncl, avec l’influence de ces pontes du régime.

LE RAS-LE-BOL DES HOMMES DE DIEU

Extrêmement révolté face à cet état de choses, ce désordre orchestré dans la communauté, l’imam Njankouo Njoya Ahmadou jounedou sine hausse le ton : « C’est douloureux de constater que même en religion beaucoup se permettent d’arnaquer pour des raison inconnues de la communauté musulmane. Ces commissions du croissant lunaire mènent en bateau toute la communauté et jouent avec leur foi si chère. Que les musulmans retournent aux anciennes méthodes qui sont celles de suivre leurs imams, leurs guides car ils sont bien éclairés et reçoivent des informations fiables venant de  leurs contacts. D’un côté, on nous impose un message chaque année et on nous fait savoir qu’il est légitime parceque l’organe qui le publie est « légitime », une légitimité inconnue qui parfois a une couleur tribale. De l’autre côté on essaie de s’arrimer à la nouvelle technologie. On a des télescopes et l’équipement adéquat pour observer le croissant lunaire, ce qui lui octroie une certaine fiabilité car on ne saurait retourner à l’epoque où pour avoir le réseau on devait grimper sur l’arbre. Ceux a qui on attend l’information ont-ils le matériel nécessaire pour observer le croissant lunaire ? Le monde évolue et l’islam n’est pas contre cette évolution. Parti d’un point de vue purement jurisprudentiel, une majeure partie des oulemas a affirmé que si la nouvelle lune est observée dans un pays, le jeûne devient obligatoire pour tous les autres pays. Et c’est  le cas cette année puisque le Tchad, la Rca, le Nigéria, le gabon etc… ont observé le croissant, seul le Cameroun a échappé. Alors nous, se basant sur l’affirmation des oulemas, nous avons jeuné. Oui lundi 11 mars marque le début du mois de Ramadan. Que la première commission se dote d’un matériel fiable pour le croissant lunaire, et que l’autre commission se tisse des relations pour avoir une entrée à la chaîne nationale, pour mieux informer les fidèles musulmans. En attendant, le monde évolue et l’avis des jurisconsultes de l’islam nous éclaire et nous éclairera toujours », s’insurge-t-il.

Ainsi, au regard de cette sortie tonitruante, on peut comprendre cette rancœur qui anime les croyants musulmans au Cameroun ce jour, qui supportent à peine cette humiliation d’un autre genre. Mais toujours est-il, la foi étant personnelle, beaucoup ont observé le jeûne aujourd’hui, sans plus attendre la position dite officielle des pouvoirs publics qui se laissent emballer par certains esprits manipulateurs.

Sébastien ESSOMBA