Hommage à “Nah Dada” : Une figure de dignité et de bienveillance s’en est allée !

Elle s’appelait Adja Pasma, mais tout le monde la connaissait sous le nom de « Nah Dada ». Une figure maternelle, un cœur immense, une mémoire vivante d’une époque où l’amour, la solidarité et le sens du devoir communautaire guidaient les gestes du quotidien. Le 26 mai 2025, cette dame de cœur s’est éteinte, laissant derrière elle une empreinte indélébile dans le cœur de ceux qui ont eu la grâce de croiser son chemin.
C’est par un souvenir lumineux que beaucoup garderont d’elle que commence cette évocation. Dans les années où la Radio nationale était encore un luxe, réservée à une élite restreinte, Nah Dada réussit l’impensable : faire annoncer la naissance d’un enfant de paysan à l’antenne de la Radio régionale de l’État à Bafoussam. L’enfant, c’était moi. Et cet acte symbolique, presque surréaliste à l’époque, allait marquer ma destinée. Car ce jour-là, une voix tendre et solennelle interrompit les programmes pour faire passer ce message : « Nous annonçons à Imam Ngapachang Mama à Mankwt par Kouoptamo que sa femme Nah Malah a donné naissance à un gros garçon. La mère et l’enfant se portent bien. »
Une annonce banale aujourd’hui, mais qui, dans ce contexte, relevait de la légende. Par amour pour ma mère, Nah Dada avait exigé qu’elle accouche sous son toit, à Bafoussam. Et par amour pour la vie, elle avait décidé que cette naissance méritait d’être célébrée par les ondes. Un geste rare, un acte d’humanisme, mais aussi un coup de génie radiophonique. Comment ne pas y voir un clin d’œil du destin, qui me destinait, moi cet enfant annoncé à la Radio, à devenir plus tard journaliste ?
UNE ÉPOUSE, UNE MÈRE, UNE GUIDE SILENCIEUSE
Nah Dada n’était pas seulement l’épouse du chef de la communauté Bamoun de Bafoussam, notre grand-oncle. Elle était une institution dans l’ombre, une femme de parole et d’action, discrète mais puissante, dont l’autorité naturelle ne s’imposait jamais par la force, mais toujours par l’exemple. Elle savait allier tradition et modernité, dignité et tendresse, devoir et générosité.
Son rôle dans notre famille allait bien au-delà des liens de sang. Elle était une deuxième mère, une veilleuse, une gardienne des valeurs. Sa voix n’a jamais été celle du tumulte, mais celle du baume. Elle n’a jamais couru derrière les projecteurs, mais elle savait éclairer les chemins de ceux qu’elle aimait.
SON DÉPART, NOTRE DETTE DE MÉMOIRE
En partant, Adja Pasma “Nah Dada” nous laisse une responsabilité : celle de ne pas oublier. Ne pas oublier ce que peut être la noblesse d’une femme qui agit par amour, sans attendre de reconnaissance. Ne pas oublier cette capacité de bâtir de grandes choses à partir de gestes simples. Ne pas oublier qu’il existe encore des héros anonymes, des bâtisseurs silencieux.
À ceux qui l’ont connue, elle laisse des souvenirs en forme de prières. À ceux qui ne l’ont pas rencontrée, elle laisse une histoire, la nôtre, marquée par sa présence bienveillante.
Repose en paix, Nah Dada. Tu as été plus qu’une parente : une étoile. Et dans la constellation de nos vies, ta lumière continue de briller.
Houzerou NGOUPAYOU